Mon père et moi avons en commun, le fait d’avoir fait nos études dans la même école : l’école Notre Dame Des Aydes à Blois.
Mes parents ont souhaité que dès la sixième, nous intégrions cette école privée catholique, réputée par ailleurs, puisque quelques personnalités y ont étudié, entre autre Eric Tabarly qui était en classe avec mon père, mais aussi Jean-Marie Auger et bien d’autres amis de mes parents. L’école Notre Dame des Aydes (ENDA) est aujourd’hui une école mixte, mais dans les années 70, c’était une école de garçons. L’école des filles était située à 200 mètres de l’ENDA et s’appelait Sainte Marie. Seule la terminale était regroupée entre les deux écoles : ENDA et Ste Marie.
A l’ENDA, j’ai gardé quelques copains d’enfance que je revois toujours, et en particulier Philippe Leroux qui habitait Bourrichard dans le Loir et cher et avec qui j’ai fait les 400 coups, mais aussi Olivier Madre, Jérôme Auger.
Quand j’ai intégré la sixième, en septembre 1973, un des profs de français (ce n’était pas le mien, mais celui de Philippe me semble-t-il) était depuis très longtemps enseignant, puisque mon père l’avait eu comme prof de Français et philosophie dans les années 45-50.
Ce professeur qui n’était pas tout jeune, s’appelait l’abbé Prudhomme, il avait la particularité d’avoir de l’embonpoint et des joues roses. Tout le monde l’appelait « Cul d’Ours ».
Lors d’un diner en famille, la première semaine de ma sixième, en racontant comment se passait la scolarité, mon père fit l’énumération des professeurs qu’il avait eu pour savoir si certains exerçaient encore.
Il m’en nomma quelques-uns, que je ne connaissais pas, jusqu’à ce qu’il parle de l’abbé Prudhomme.
Il m’avoua que ce professeur, avait un surnom, à son époque, et que malgré nos manifestations pour le connaitre, jamais mon père ne cracha le morceau. Son surnom devait être lié à une insulte grave.
Pendant vingt ans, cette question me tarauda, et je rêvais de connaitre le surnom de « Cul d’Ours ».
Un soir, bien des années après, alors que mon père était déjà en retraite, cette conversation revint sur la table.
C’est alors que je posai la question fatidique à Papa :
« Papa, maintenant, tu peux nous le dire, quel était le surnom de l’abbé Prudhomme que tu n’as jamais voulu nous révéler »
Je revois mon père, hésitant, penaud, comme s’il nous livrait un secret de famille.
« Son surnom, c’est………..Cul d’Ours ».
Cette révélation eut sur moi l’effet d’une bombe. Toutes ces années à imaginer, les surnoms les plus saugrenus, les jurons les plus terribles pour s’entendre dire que ce surnom, on le connaissait depuis le début.
Pourquoi, mon père n’a pas voulu me révéler ce surnom plus tôt, cela reste un mystère, mais « Cul d’Ours » devait être pour mon père un juron de première catégorie.
